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Parlez-moi d'amour!

Illustration: Amour sacré et Amour prophane par Titien en 1514

Bonjour Annely, Bonsoir Mehdy, bonjour à tous!

Il y a deux semaines dans Croc’Philo, nous abordions la notion d’altérité, et pour ceux qui étaient avec nous, vous vous en souvenez peut-être, nous vous annoncions qu’aujourd’hui, il serait question d’amour… Annely, tu avais l’air plutôt “emballée” par l’idée je crois?

Comme le dit le philosophe contemporain André Comte Sponville, l’amour est sans doute le sujet le plus intéressant pour la philosophie, pour preuve dit-il, quand à un dîner quelqu’un après avoir parlé de son travail ou de politique, avoir commenté l’actualité… Se met à parler d’amour, il gagne l’attention de tous. Et je confirme que l’effet joue aussi en classe avec les élèves.

Mais si la philosophie ne fera sans doute jamais aussi bien que la littérature sur ce sujet, c’est peut-être parce-qu’elle cherche davantage à définir l’amour plus qu’à le décrire ou à l’exprimer (et du même coup l’amour nous échappe sans doute encore davantage en philosophie, nous donne moins envie d’être amoureux que ne le fait la lecture de certaines pages de la littérature), et que d’une certaine façon, elle nous parle moins d’amour quand elle cherche à le définir, que ne le fait la littérature. La littérature elle cherche les mots pour le dire, parfois sans le nommer, avec la poésie -en vers ou en prose-, de l’ode aux romans épistolaires, en passant par de nombreux genres et des personnages parfois mythiques, elle est un art quelque part entre l’esquive et l’affrontement, la plongée en soi et l’exacerbation du sentiment, voire, sa cristallisation.

Néanmoins, ce qui unit la philosophie et la littérature sur ce sujet, c’est peut-être ce parfum d’universel dégagé par ce sentiment qui porte en son sein des singularités que la littérature sait souvent si bien dépeindre, et conjuger à tous les temps, à toutes les époques; mais que la philosophie sait gagner, elle, par le questionnement.

Et l’amour nous questionne toutes et tous et ne cesse de se dire ou de tenter de s’exprimer, en chanson, en mots, en musique, en peinture ou au cinéma… C’est sans doute parce-que nous le rencontrons tous, et chacun, à notre façon. Ce sentiment humain, trop humain peut-être, nous désarçonne ou nous renforce, nous surprend ou nous rassure, mais toujours, il parle de nous et jamais, il ne nous indiffère. Et en philosophie, cet ailleurs de la littérature, en ne limitant pas (sans doute comme la littérature d’ailleurs) le sentiment à un objet du corps et du coeur mais y invitant aussi l’esprit, la philosophie se pose de façon récurrente la question de ce qu’est l’amour, et ce dès l’Antiquité. Avec l’Eros et l’amour platonicien ou avec la Philia et l’amour aristotélicien, que l’on distingue parfois un peu trop hâtivement d’ailleurs, comme ce qui serait amour d’une part et amitié d’autre part.

Alors qu’est-ce donc que l’amour?Annely, Mehdy?… Comment seriez-vous tentés de définir l’amour?

Force est de constater qu’en général, il nous inspire, même dans le silence, même quand nous n’avons pas les mots pour le dire.

Pour Pascal, l’amour est spirituel, un peu comme ce que les grecs appelaient l’agapé, mais il n’en est pas moins du corps. L’Agapé était un peu entendue depuis l’antiquité comme un sentiment de bonne santé de l’âme ou de l’esprit. Pour Pascal, jamais l’amour ne nous indiffère même dans l’absence de définition que nous en avons, car il “nous porte à aimer ce qui nous parait beau sans que l’on nous ait jamais dit ce que c’est.”

Pour lui, il est du corps, du coeur et de l’esprit et une vie heureuse commence par l’amour mais aussi se compte avec la raison. Ainsi, quand il parle d’une vie qui commence par l’amour, il entend plutôt le commencement d’une vie adulte, car il n’entend pas, en ce sens, qu’un enfant soit un homme. Pour Pascal, “l’amour est un caractère de nos coeurs qui se développe à mesure que l’esprit se perfectionne”. Ainsi, dans Le discours sur les passions de l’amour, il défini les passions comme à la fois des sentiments et des pensées. Et si nous ne pouvons définir ce qu’est l’amour, il écrit que: “La netteté d’esprit cause aussi la netteté de la passion; c’est pourquoi un esprit grand et net aime avec ardeur, et il voit dictinctement ce qu’il aime.” L’amour pour Pascal n’est donc pas géométrie, science et raison mais il n’y est pas étranger, car il est quête de vérité.

Pour Pascal, l’amour se sent, on ne délibère pas dessus, on y est porté. C’est une passion de feu, c’est-à-dire l’un de nos passions les plus essentielles, de nos pensées et sentiments qui donnent nécessairement du sens à nos misérables existences de mortel. Mais il ne faut pas exclure la raison de l’amour, et pour lui, l’amour n’est pas aveugle. Il est une façon de voir la beauté, en dehors de soi, puisque nous sortons ainsi de notre triste condition avec soi, pour nous tourner vers la beauté qui est partagée de mille différentes manières. Et si “Nous connaissons la vérité non seulement par la raison mais encore par le coeur”, écrira t-il dans les Pensées; c’est que l’amant, celui qui aime, préfigure chez Pascal, en un sens, le croyant uniquement préoccupé par la vérité. Et la vérité pour lui, s’incarne dans la foi en Dieu.

Simone Weil pensera également l’amour comme spirituel quand elle écrira que: “ Dans la beauté du monde la nécessité brute devient objet d’amour.” Mais ce n’est pas pour elle directement l’amour de la vérité qui nous fait aimer, mais « Ce qui permet de contempler la nécessité et de l’aimer, c’est la beauté du monde. Sans la beauté ce ne serait pas possible. » Entendu par là que nous ne pourrions pas aimer le monde. La beauté du monde, il faut entendre celle de la nature, au sens qu’elle développera dans La pesanteur et la grâce notamment. Et l’amour devient avec elle comme une acceptation, “le seul organe de contact avec l’existence” écrira t-elle et pour elle, on ne reconnait pleinement l’existence que de ceux qu’on aime.

D’ailleurs, sur l’existence des autres pour nous, lors de la dernière chronique, consacrée au goût des autres et à l’altérité, je vous parlais entre autres d’Emmanuel Levinas, pour qui la reconnaissance de notre humanité en l’autre est la condition de toute morale. Pour lui, : ”L’amour, c’est de l’altérité radicale”. Et l'amour signifie, avant tout l'accueil d'autrui comme soi. L’autre ne m’appartient pas et la rencontre avec l’autre ne peut être que dans la relation suspendue que j’ai avec lui. Relation qui est aussi en soi une forme de distance (je ne suis pas l’autre, nous ne formons pas qu’un –il s’agirait de s’éloigner de cette illusion-) , et l’amour, dans cette distance, cultive le goût et l’illusion de la fusion. C’est en ce sens que la caresse peut-être témoignage et ressenti d’amour. Sur cette altérité radicale et la caresse, Levinas écrit quelques pages dans Totalité et Infini. Il considère en un sens, que la caresse constitue bien une démonstration, qui n'a cependant rien à voir avec la géométrie ou la raison. Pour Lévinas, la caresse fait naître un entre-deux, un monde intermédiaire, où chacun est à la fois touchant et touché, n'est plus exactement soi-même, sans être pour autant devenu autre. Consistant "à ne se saisir de rien", la caresse se contente d'effleurer. Elle glisse, toute en tact, indéfiniment. Elle cherche, sans savoir quoi, sans rien trouver, mais sans cesser de chercher. Elle "marche à l'invisible". Elle “transcende le sensible” et le corps “caressé-caressant” n’est plus le corps physiologique, plus le corps-chose des médecins, c’est un corps autre, à la limite du dicible et du pensable. Présent et toujours en devenir.

Sur la caresse, j’aimerai faire référence à un autre écrit, littéraire cette fois: Les Caresses de Maupassant (Gil Blas, 14 août 1883) dans lequel Geneviève confie à Henri son dégoût de l'acte charnel. Henri lui répond que la caresse est l'épreuve de l'amour. Voici la lecture d’un extrait de la lettre d’Henri à Geneviève dans lequel il fait référence à un philosophe qu’il ne nomme pas, mais qui se situe bien loin de toute passion amoureuse et de tout romantisme…

“Un philosophe, qui ne pratiquait point ces doctrines, nous a mis en garde contre ce piège de la nature. La nature veut des êtres, dit-il, et pour nous contraindre à les créer, il a mis le double appât de l’amour et de la volupté auprès du piège. Et il ajoute : Dès que nous nous sommes laissé prendre, dès que l’affolement d’un instant est passé, une tristesse immense nous saisit, car nous comprenons la ruse qui nous a trompés, nous voyons, nous sentons, nous touchons la raison secrète et voilée qui nous a poussés malgré nous.”

Et Henri, avec les mots de Maupassant, après avoir reconnu que parfois, les baisers sont froids et décevants, de poursuivre…

“Mais, quand cette sorte de nuage d’affection, qu’on appelle l’amour, a enveloppé deux êtres, quand ils ont pensé l’un à l’autre longtemps, toujours, quand le souvenir pendant l’éloignement veille sans cesse, le jour, la nuit, apportant à l’âme les traits du visage, et le sourire, et le son de la voix ; quand on a été obsédé, possédé par la forme absente et toujours visible, dites, n’est-il pas naturel que les bras s’ouvrent enfin, que les lèvres s’unissent et que les corps se mêlent ?”

Ce philosophe auquel Maupassant fait référence dans ce le premier extrait de ce passage, c’est Shopenhauer, dans la Métaphysique de l’amour sexuel. Pour lui, la sexualité est une force motrice loin de toutes illusions de la passion amoureuse, et il considère l’amour comme une ruse suprême de la volonté de vivre qui se sert de l’individu pour perpétuer l’espèce. Et si l’amour est aveugle, il n’est peut-être pas innocent et spontané. Il y a bien selon lui une magie de l’amour, qui opère parfois dès le premier regard, mais elle n’est que forte illusion. L’amour ne serait pas nos préférences individuelles qui s’expriment, ni quelqu’alchimie miraculeuse, mais l’objet réel de la passion amoureuse n’est qu’un point de fixation, une mesure subjective de l’idéal.

Et si on s’éloigne de la misanthropie et du pessimisme de Shopenhauer, on peut néanmoins souligner que si l’amour est certainement chose sérieuse, le hisser à un sentiment suprême ou sacré en toutes circonstances ne le dessert pas toujours. Comme si dans l’échec relatif de sa définition, nous tentions de le faire exister parfois à tout prix, dans toutes les contradictions que cela suppose de poser comme norme, un sentiment. Aimer, ça ne se décrète pas.

Et qu’il soit Eros, Philia, Agapé, désir, ruse, manque, transgression ou excès, il n’est en tout cas certainement pas seulement un discours. Ou le discours ne peut que fragmenter le sentiment amoureux, comme l’a si bien développé Roland Barthes dans: Fragments du discours amoureux. “L’amour est à réinventer” écrivait Rimbaud (repris par Badiou dans L’éloge de l’amour entretien avec Nicolas Truong sorti en 2009) et la poétique de la rencontre amoureuse sans cesse réinventée par le cinéma ou la littérature, en est sans aucun doute le témoignage… Je terminerai avec quelques mots de Brigitte Fontaine qui dans l’un de ses très jolis ouvrages publié en 2012, L’artiste en déshabillé de soie, se joue du sérieux de l’amour pour mieux le célébrer : “L’amour n’existe pas… C’est pour ça qu’il faut le faire.”

Fin de chronique avec: Musique Pipeau Brigitte Fontaine / Kekeland en 2001

Emilie

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